Strasbourg – Deux Rives- réseau de chaleur et la fin du tout à la voiture

Strasbourg – Deux Rives- réseau de chaleur et la fin du tout à la voiture

Nous revenons d’un voyage d’étude avec le EcoBuild, le cluster bruxellois des acteurs de la construction et de la rénovation durable. IOT Factory en fait partie, étant un acteur de l’éfficacité énergétique et de la réduction des gaz à effet de serre. Dans le groupe, des architectes, ingénieurs, urbanistes, spécialistes des matériaux bio-sourcés…

Nous avons eu la chance de visiter un nouveau projet urbanistique, le quartier Deux-Rives/Zwei-Ufer, à l’Est de Strasbourg. Un projet qui ambitionne, d’ici 15 ans de réhabiliter un zone industrielle portuaire (250 hectares), entre les rives de l’Ill en France et du Rhein en Allemagne. Un mix de constructions neuves et de rénovation de bâtiments industriels, afin de proposer 4.000 logements abordables, des commerces, de l’artisanat, des lieux socio-culturels…

2 concepts dans le projet ont retenu notre attention, qui cadrent avec nos objectifs communs en terme d’efficacité énergétique, de réduction des gaz à effet de serre et de mobilité douce: les réseaux de chaleurs, et la fin du « tout à a voiture ».

Réseaux de chaleur urbain

L’Eurométropole de Strasbourg développe une stratégie de mise en place de réseaux de chaleur. 3 réseaux de chaleurs sont actifs aujourd’hui dans la cité, qui couvrent aujourd’hui de 64 km et délivrent déjà plus de 500 GWh/an, soit les besoins de 50.000 logements.

Actuellement, la chaleur est produite à partir de 60% de gaz, bois: 32% et 8% de l’incinération de déchets. D’ici 2030, l’ambition de Strasbourg est de porter l’énergie renouvelable utilisée à 83%.

Illustration: https://en.wikipedia.org/wiki/District_heating

Le principe d’un réseau de chaleur est de centraliser la production de chaleur, dans des usines centralisées, est de la distribuer vers les bâtiments où un échangeur de chaleur (sous-station) délivre ensuite l’eau chaude sanitaire et le chauffage.

Les avantages d’un réseau de chaleurs sont nombreux. La possibilité de valoriser les nouvelles sources d’énergie (renouvelable, incinération des déchets, géothermie…) sans changement des équipements dans les bâtiments commerciaux et les logements. Réduire, simplifier les installations dans les bâtiments (plus de chaudière, simplification de la maintenance…). Optimiser la production, etc.

Le principal challenge est la mise en place du réseau, qui nécessite des investissements importants dans un environnement urbain dont le sous-sol est déjà très encombrés.

Le concept de réseau de chaleur n’est pas nouveau. Les romains avaient déjà eu cette idée. Mais c’est dans le quartier de Lock Port à New York en 1877 que le premier réseau a été déployé. En Europe, ce sont surtout dans les pays du nord de l’Europe (Danemark, Suède et Finlande) que sont apparus des réseaux de chaleur. La Russie soviétique a largement développé le concept à partir de 1912, pour en faire le principal réseau de distribution d’énergie urbain, ce qui explique qu’aujourd’hui, la plus grande proportion de réseaux de chaleurs sont présents dans les pays du Nord et de l’Est de l’Europe. 65% de la chaleur distribuée au Danemark, 56% en Lituanie, 53% en Slovaquie…

A Strasbourg, dans le quartier Deux Rives, le fluide caloporteur est transporté à 85°C. Une production de chaleur locale (actuellement au gaz) apporte encore 30% de l’énergie nécessaire, ce qui permet aussi de maintenir la livraison de chaleur, localement, en cas de problème sur le réseau de chaleur de la ville.

La fin de la priorité à la voiture

Dans le district « Deux Rives » de Strasbourg, les nouveaux bâtiments sont construits sans garages sous-terrains. L’idée est que les bâtiments doivent pouvoir évoluer dans le temps. Des sous-sols, sur plusieurs étages, dédiés à la voiture, sont très difficiles à reconvertir à d’autres usages. Il a donc été décidé de construire des parkings silos (6 pour les 2500 hectares) sur base d’une clé de répartition de 0,6. Donc 0,6 voiture par logement. Le temps où chaque foyer disposait de 1 ou 2 voitures est révolu. Le parking sur la voirie est par ailleurs interdit. De plus, les occupants ne sont plus propriétaires de leur emplacement de parking. Il s’agit d’une concession de 30 ans (18.000€ par logement), et une loyer mensuel est demandé (50€). Les emplacements ne sont pas nominatifs, car ces mêmes emplacements de parking peuvent être occupés par les visiteurs, et travailleurs présents sur le site en journée.

L’objectif est clair. Favoriser les formes alternatives de mobilité. Le tramway permet de rejoindre la ville en 10 min. En vélo, 15 minutes. Sur un terrain plat, en site propre. Pour les trajets extra-urbains, la location de voiture « à la demande » se développe.
Un chiffre intéressant pour la région bruxelloise. 30% des foyers ne disposent déjà plus de voitures. Un chiffre qui devrait peut-être est communiqué…

Le projet « Deux Rives » à Strasbourg est ambitieux et inspirant. Reste un challenge de taille. Les premiers habitants doivent accepter de vivre dans un chantier permanent, qui va se prolonger sur encore plus de 15 ans…